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Tourisme du silence : quand voyager rime avec tranquillité

Le Larousse le définit comme « l’absence de bruit dans un lieu calme » : le silence n’est pas que bénéfique aux oreilles, il permet aussi de reposer le système nerveux, et d’éviter ou en tout cas apaiser le stress. Pourtant, difficile dans nos sociétés occidentales modernes d’échapper aux nuisances sonores du quotidien. Pour pallier cela, un tourisme du silence émerge depuis quelques années. Voici en quoi il consiste.

Fuir le bruit du métro, l’agitation des rues, le vacarme des centres commerciaux, les babillages de la télévision ou de la radio en fond sonore… La quête du silence n’est pas nouvelle, en témoigne la parution en 1997 du « Guide des lieux de silence » rédigé par Joachim Bouflet, qui répertoriait dans cet ouvrage 260 « lieux de silence, couvents et monastères » en France.

Pour le bioacousticien Gordon Hempton « le silence est en voie d’extinction »

Vingt ans plus tard, en 2017, un article de Condé Nast Traveler soulignait que le silence était la dernière tendance en matière de vacances bien-être : « De nos jours, une multitude de centres de villégiature et de retraites vont au-delà des détox numériques de base et des services de spa relaxants, et demandent à leurs clients de déconnecter et de se taire », pointait du doigt le journaliste.

Le silence, denrée aussi rare que bénéfique

Car au XXIe siècle, il est toujours aussi difficile d’échapper au bruit, ce terme à consonance péjorative que le gouvernement définit comme « un phénomène acoustique produisant une sensation auditive considérée comme désagréable ou gênante ». Avant de préciser que « l’excès de bruit a des effets sur les organes de l’audition (dimension physiologique), mais peut aussi perturber l’organisme en général, notamment le sommeil ou le comportement (dimension psychologique). Les nuisances sonores subies peuvent résulter de trois sources principales : les transports, le voisinage, les activités ».

Dans des zones densément peuplées, comme c’est le cas de plusieurs secteurs en Île-de-France, les habitants perdent en moyenne 10,7 mois en bonne santé au cours d’une vie entière en raison du bruit, selon une étude menée par BruitParif pour quantifier les impacts du bruit des transports dans la région. De manière plus générale, l’Agence européenne de l’environnement (AEE) alertait en septembre 2020 sur les méfaits importants de la pollution sonore, soulignant que « les impacts du bruit de l’environnement ont un effet significatif et souvent sous-estimé sur la qualité de la vie et de la santé des citoyens européens ». Si l’on regarde dans le détail, l’on constate que ce sont les routes qui sont la principale source de bruit ambiant, « 20 % de la population de l’Union européenne étant exposée à des niveaux de bruit de la circulation qui sont nocifs pour la santé ».

Selon l’Organisation mondiale de la santé, les pollutions sonores sont la deuxième cause de morbidité, derrière la pollution atmosphérique, parmi les facteurs de risques environnementaux en Europe. Mais comment, et quand, fuir ces pollutions sonores ?

Tourisme du silence : une tendance déjà en vogue depuis quelques années

Si le confinement a renforcé les envies de calme et de silence chez les voyageurs, notons que depuis quelques décennies déjà, nombreux sont ceux qui expérimentent le silence comme mode de vie lors de retraites silencieuses, le plus souvent spirituelles.

Car s’octroyer une pause au sein d’une abbaye, comme celle de Rhuys, dans le Morbihan, n’est pas nécessairement lié à une pratique religieuse. Outre les retraites spirituelles, des séjours individuels ou en groupe peuvent en effet être réservés : « Vous avez envie de faire une halte dans votre quotidien, de vous ressourcer, d’effectuer vos révisions d’études, de trouver l’inspiration, d‘écrire, de peindre… de vous retrouver au calme en bord de mer. Nous vous accueillons avec joie et mettons à votre service tous nos moyens pour vous rendre le séjour le plus agréable possible », peut-on ainsi lire sur le site de l’abbaye de Rhuys.

De plus en plus d’instances touristiques surfent donc sur l’argument du silence pour attirer au sein de leur destination : ainsi, dans les Hauts-de-France, il est possible de profiter d’un « bain de jouvence » au château du Denacre, lors de séjours intitulés « Moments Suspendus », organisés par le mouvement « Silence ». Le but de ce collectif ? Faire bénéficier d’un silence acoustique total dans un cadre verdoyant de 8 hectares, en coupant son smartphone, en participant à des cours de yoga et de méditation, et à divers ateliers nature. Au Havre, les visiteurs peuvent découvrir le « Jardin du silence », un « lieu de méditation, de recueillement, de réflexion, de contemplation de ce que peut être la beauté de la nature comme de la vie loin du tumulte et de l’effervescence du port et de la ville ». En 2021, l’office de tourisme de Norvège avait même publié un clip promotionnel pour voyager dans le pays en mettant en avant le silence et le fait de profiter des différents bruits de la nature.

Lorsque l’on est à la recherche d’endroits où déconnecter à tout prix, l’on peut aussi regarder du côté de la certification « Quiet Parks International », dont la mission est de préserver les derniers « spots » de silence sur Terre. Initié par le bio-acousticien étasunien Gordon Hempton, qui s’est donné pour mission de recenser les derniers havres de paix sonores au monde, ce mouvement a d’ores et déjà distingué certains endroits où se ressourcer en silence, comme le parc Hampstead Heath de Londres, au Royaume-Uni, le parc de la rivière de Zabalo, en Équateur, ou encore le parc national de Yangmingshan à Taïwan (qui fut le premier parc urbain à être certifié). Pour obtenir la certification, la règle est simple : un lieu ne doit pas subir plus d’un bruit humain toutes les 15 minutes. Concernant les sites urbains, la fondation a un seuil de tolérance un poil plus élevé, prenant en compte le bruit de fond causé par la circulation routière, notamment.

Relais du Silence, un label pour trouver un hôtel dans un lieu silencieux

Au-delà des visites, il n’est pas rare de rencontrer des difficultés à trouver un hébergement silencieux lorsque l’on voyage. C’est pourquoi, depuis 1968, le label « Relais du Silence » regroupe « des hôtels de charme situés dans des environnements naturels et verdoyants, propices à la détente, au ressourcement et au bien-être des voyageurs ».

La chaîne fédère aujourd’hui quelque 200 établissements répartis dans 10 pays d’Europe, majoritairement en France, où l’on compte près de 120 hôtels, « tous localisés dans un cadre naturel préservé et authentique ».

Hôtels, châteaux, manoirs ou encore fermes : de nombreux types de séjours sont disponibles, pour toutes les bourses. Le plus souvent, ces lieux proposent des activités en pleine nature, pour pleinement déconnecter — balades à vélo, promenades en forêt, ski alpin ou encore pique-nique dans un cadre authentique.m

Delphine Le Feuvre

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