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Coupe du monde de biathlon au Grand-Bornand : la neige acheminée par camion… un haut degré de débilité!sharethis sharing button

Du 15 au 18 décembre prochains se tiendra une étape de la Coupe du monde de biathlon au Grand-Bornand. La neige manquant cruellement dans la station haut-savoyarde, ce sont des camions qui acheminent des milliers de mètres cube de neige afin de garantir une piste en état le jour J. « Une banalisation des atteintes à l’environnement », déplorent plusieurs associations écologistes.

Début novembre déjà, la station de Bessans faisait parler en ouvrant ouvrir une piste de 3 km de ski de fond malgré sa moyenne altitude (1 750 m), réutilisant 16 000 m3 de neige de la saison dernière via la technique du snowfarming, qui permet d’isoler la neige de l’air ambiant et des rayons du soleil.

Pour accueillir la coupe du monde de biathlon prévue dans une dizaine de jours, la station du Grand-Bornand a dû se résoudre à transporter de la neige en camions pour couvrir la piste du stade (située à 1 000 m d’altitude), faute de précipitations neigeuses suffisantes. L’organisation estime les besoins en neige à 24 000 m3, pour moitié stockée dans la ferme à neige du Chinaillon et mélangée à la neige de culture, comme l’indique Le Dauphiné Libéré.

Une neige « artificielle et carbonée »

Dans un communiqué, un collectif d’associations composé de Mountain Wilderness, des antennes départementale et régionale de la FNE, la Nouvelle Montagne, Résilience Montagne et Pour une Transition Participative à Thônes précise que l’eau utilisée pour alimenter les canons à neige « est pompée dans le lac de la Cour, lui-même alimenté par la retenue collinaire du Maroly » et martèle : « produire de la neige artificielle n’est pas sans impact pour les grands équilibres du cycle de l’eau ».
Rappelant les JO de Pékin ou l’attribution des Jeux asiatiques d’hiver à l’Arabie Saoudite, les associations déplorent que « dans les montagnes françaises aussi, l’environnement est parfois encore sacrifié sur l’autel des grandes manifestations sportives » avec « l’obstination à maintenir à tout prix le modèle industriel de la neige ».
Elles estiment que ce « cirque motorisé » est « grave » à l’heure de « l’engagement de tous pour des transitions énergétiques et écologiques », pointant au passage le sponsor automobile du circuit mondial de biathlon et le greenwashing de l’évènement. Leur proposition : organiser les compétitions « à des périodes et lieux propices à l’enneigement naturel » et « tourner la page de la montagne artificialisée » pour s’engager vers la neutralité carbone.

Les critiques se succèdent autour de la piste de biathlon du Grand-Bornand couverte de neige artificielle

La piste de biathlon du Grand Bornand, destinée à recevoir une étape de Coupe du monde du 15 au 18 décembre, fait l’objet de plusieurs critiques. Faute d’un enneigement suffisant, elle a été recouverte de neige artificielle acheminée par camions dans la station de Haute-Savoie.

Le défilé de camions remplis de neige sous les fenêtres des habitants n’est pas passé inaperçu. La couverture artificielle de la piste de l’étape de Coupe du monde de biathlon prévue du 15 au 18 décembre au Grand-Bornand (Haute-Savoie), en l’absence de manteau blanc, soulève de vives critiques.

La neige utilisée, en partie artificielle, avait été conservée depuis la dernière saison hivernale sur site et à proximité sous une couche de sciure. « On a tiré à boulets rouges sur (les JO d’hiver à) Pékin. Ou plus récemment sur les Jeux asiatiques d’hiver attribués à l’Arabie Saoudite. On s’est beaucoup moqué de ça, en France en particulier. Mais là, on se rend compte qu’on est aussi dans les mêmes logiques absurdes », déplore Corentin Mele, de France Nature Environnement Haute-Savoie.

La FNE et plusieurs associations de défense de l’environnement (Mountain Wilderness, Résilience Montagne, La Nouvelle Montagne, Pour une transition participative) se sont élevées contre le « ballet de camions » qui a, début décembre, assuré le transport de plusieurs milliers de mètres cube de neige destinés à couvrir la piste en vue de la compétition. Les images sont assez saisissantes, alors que la neige est encore peu tombée cette année dans la station des Aravis : un serpent de neige ondule au milieu d’une verte vallée.

« Pékin a participé à la banalisation de la langue de neige au milieu du désert. Il faut que ça continue de choquer, comme au Grand-Bornand », peste Vincent Neirinck, de Mountain Wilderness.

Du côté de la mairie, on comprend que les images puissent heurter. « On ne se cache devant rien », assure le maire André Perrillat-Amédé, également président du Comité d’Organisation Annecy Le Grand-Bornand Biathlon.

La fabrication de la neige de culture, le stockage, le transport et la mise en forme pour la piste « représentent moins de 1 % du bilan carbone général » de l’organisation de l’épreuve, explique l’élu à l’AFP, précisant que l’immense majorité des émissions sont liées au transport de personnes (public, athlètes, journalistes). Environ 60 000 à 65 000 personnes sont attendues pour les compétitions prévues sur quatre jours à environ 1 000 m d’altitude.

« S’adapter à la réalité »

« Il y a un modèle du ski dans sa globalité qui est perpétué », regrette Valérie Paumier, de Résilience Montagne, alors que, dans les Alpes comme ailleurs, le réchauffement climatique interroge sur l’avenir de l’industrie du ski.

Réagissant sur Twitter à cette affaire, l’athlète Kilian Jornet prône une transition durable menée par les fédérations de sports d’hiver, avec l’aide de leurs comités environnement, les exhortant à ne pas « ignorer » le problème.

« Ici c’est le cas d’une compétition de biathlon, mais j’ai vu la même chose pour le nordique, l’alpin, même le skimo [une sorte de ski de randonnée extrême]… Les calendriers et les sites doivent s’adapter à la réalité », plaide le champion d’ultra-trail.

Chaque année, 25 millions de mètres cubes d’eau sont transformés en neige artificielle

Alors que les températures se réchauffent, les stations de ski tentent de sécuriser leur enneigement pour maintenir leur rentabilité, au prix de lourds investissements et d’une importante consommation de ressources

Reconversion hors de question pour le moment : 90 million Auvergne-Rhône-Alpes pour continuer dans le deni…

L’affaire se complique avec le changement climatique : la neige artificielle nécessite des températures inférieures à 0 °C, et elle ne peut être qu’un complément à un tapis blanc naturel qui fond plus tôt. Val-d’Isère, Les Deux-Alpes et d’autres stations d’altitude ont dû arrêter le ski d’été en ce mois de juillet : il a fait trop chaud. Megève a annoncé l’impossibilité d’organiser la coupe du monde de snowboard en janvier 2023 : ses retenues manquent d’eau. « Nous n’ignorons pas le changement climatique, le débat à La Clusaz nous interpelle, assure Laurent Reynaud, délégué général de DSF. Mais il n’y a pas de danger imminent, pas avant quinze ou vingt ans, selon Climsnow, une recherche de Météo-France et de l’Inrae sur les projections d’enneigement en 2050. Plus d’une centaine de stations les utilisent. »

Il souligne les progrès accomplis dans la gestion de l’eau, en mesurant au centimètre près les besoins en neige sur les pistes, vante les dameuses qui, à l’avenir, réduiront leur consommation de gasoil. Mais envisager une reconversion est hors de question pour le moment. « Une station du Jura a annoncé qu’elle se prépare à mettre fin au ski dans quinze ans, mais à ma connaissance, c’est tout. Saint-Honoré-en-Vercors avait dû arrêter ses remonte-pentes, c’est devenu une friche touristique. Rien ne peut remplacer le ski alpin », affirme Laurent Reynaud.

Les élus sont d’autant plus enclins à partager son point de vue, qu’ils sont encouragés dans leurs investissements par la région Auvergne-Rhône-Alpes. Lors du « plan montagne » 2016-2021, 90 stations avaient été accompagnées moyennant 50 millions d’euros. Le second plan a prévu une enveloppe de 10 millions d’euros pour les aider dans leur transition énergétique et leurs projets de développement durable pour les cinq prochaines années… Et 30 millions d’euros pour sécuriser leur enneigement. La stratégie régionale n’intègre pas, pour l’heure, la flambée des coûts de l’énergie, indispensable pour fabriquer de la neige de culture.

MCD

 

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