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Capitalisme : La planète à terre

Péché n° 1 : Le capitalisme et son modèle de développement saccagent l’environnement. Un phénomène qui s’emballe.

Ce n’est pas l’été caniculaire que nous avons passé qui démentira la tendance séculaire au réchauffement climatique. Au XXe siècle, la température moyenne de la planète a grimpé de 0,6 °C. Celle de la France métropolitaine de 1 °C, et même de 2 °C entre la moyenne de la période 1961-1990 et celle de 1991-2018. Pourtant, le revenu national par habitant dans l’Hexagone a progressé deux fois moins vite durant la deuxième période que durant la première. Conclusion : un seuil est franchi et le phénomène s’emballe.

A marche forcée. A notre échelle (et à celle des pays de vieille industrialisation), nous payons à retardement les années de croissance débridée (1945-1975), au cours desquelles ni la question climatique ni la notion d’environnement n’existaient dans le débat public. S’y ajoute le rattrapage économique à marche forcée des « pays émergents » (Chine, Inde…), soit trois milliards d’hommes. Une bonne nouvelle, mais qui se traduit actuellement par de considérables émissions supplémentaires de gaz à effet de serre : comme le nuage radioactif de Tchernobyl, elles sont sans frontières. Si bien que, en définitive, ces émissions ont doublé depuis 1980.

Les émissions de gaz à effet de serre ont doublé depuis 1980

N’oublions pas la note à venir, lorsque les trois autres milliards d’hommes aujourd’hui englués dans une misère sans nom – au point, pour certains, de quitter à tout prix leur pays – prendront enfin la juste part qui devrait leur revenir. Ils ne le pourront pas si nous leur léguons une planète inhabitable et vidée de ses ressources.

Triple responsabilité. Dans le saccage environnemental passé, il faut bien reconnaître que les pays anciennement « socialistes » ont pris leur part. Mais le capitalisme porte une triple responsabilité dans le modèle de développement qui met aujourd’hui en danger la planète. Première responsabilité, la priorité donnée au court terme : le profit et son importance dans le fonctionnement de notre système économique amènent entreprises ou particuliers à sous-estimer, ignorer ou dissimuler les coûts environnementaux (et sociaux) au détriment de ceux sur qui ils pèsent ou pèseront. Le futur est ainsi sacrifié au présent et les générations à venir sont tenues pour quantité négligeable.

Le profit et son importance dans le fonctionnement de notre système économique amènent entreprises ou particuliers à sous-estimer, ignorer ou dissimuler les coûts environnementaux (et sociaux)

Deuxième responsabilité, la tendance au chacun pour soi : le climat et les ressources non renouvelables sont des biens communs. Améliorer le premier et réduire les prélèvements sur les secondes ne peuvent se faire qu’au prix d’un effort commun. Jouer les passagers clandestins est cependant très tentant : les autres payent, je profite de leurs efforts sans rien payer… Dans un système concurrentiel, ceux qui jouent l’individualisme gagnent, au détriment des autres.

Troisième responsabilité, trop n’est jamais assez : la croissance est le mot fétiche du capitalisme. Car produire davantage permet de gagner davantage, et donc de consommer davantage. Mais la croissance, même « durable » ou « verte », implique plus de prélèvements et plus de rejets : si l’on se fixe pour objectif que l’ensemble de la population mondiale dispose du niveau de vie actuel des habitants de la France, il faudrait multiplier par cinq la consommation. Et par dix si l’on se donne cinquante ans pour y parvenir, avec une croissance française de 0,7 % par an (le rythme observé en moyenne annuelle depuis 2000) et une augmentation de la population mondiale de 50 % d’ici là (prévisions de l’ONU). Qui peut croire que ce serait possible sans aggravation de nos maux environnementaux ?

La solution réside dans la sobriété et un partage plus équitable. Donc la fin ou la transformation spectaculaire d’un capitalisme qui, au contraire, a besoin des inégalités pour stimuler la croissance.

Denis Clerc

https://www.alternatives-economiques.fr/planete-a-terre/00091431?utm_source=emailing&utm_medium=email&utm_campaign=NL_Quotidienne&utm_content=23122019

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