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Monsieur Emmanuel Macron
Président de la République Palais de l’Élysée
55 rue du Faubourg-­Saint-­Honoré
75008 Paris, France
Paris, le 12 octobre 2020
Objet : Etat des lieux relatif au suivi de la transmission “sans filtre” des 146 mesures de la Convention Citoyenne pour le Climat et demande de réaffirmation de la parole présidentielle.
Monsieur le Président de la République,
Dans la lignée de l’engagement collectif qui est le nôtre depuis plus de 9 mois, nous, membres de l’association « les 150 » qui regroupe les participants à la Convention Citoyenne pour le Climat –assemblée que vous avez instaurée -­, restons pleinement mobilisés pour assurer le suivi des propositions que nous avons remises le 21 juin dernier au Gouvernement.
C’est dans ce contexte que nous avons souhaité vous interpeller personnellement et directement pour vous dire le travail accompli et les difficultés rencontrées, avec l’espoir que vous puissiez, à votre tour, nous renouveler votre soutien et votre envie ferme de faire aboutir nos propositions.
Depuis la publication de la lettre de mission signée parle Premier ministre M. Edouard Philippe, vous avez à deux reprises tenu à rencontrer les 150 et à leur affirmer vos engagements vis-­à-­vis du processus “sans filtre” annoncé, ainsi que l’ambition que vous placiez en cette initiative démocratique inédite et en ses futurs résultats pour le climat. Le 10 janvier d’abord, au Conseil économique social et environnemental, puis le 29 juin, lors de la réception officielle au cours de laquelle vous nous avez reçus, les citoyens ont entendu vos encouragements et vos remerciements pour le travail accompli. A cette reconnaissance, vous avez alors ajouté un nouveau défi qui prolonge le mandat initialement confié : suivre la mise en œuvre de nos mesures, notamment dans la perspective d’un projet de loi dédié.Cette volonté de nous “associer”, exprimée distinctement à trois reprises dans votre discours, a été prise très au sérieux par la plupart des 150 qui ont répondu présents jusqu’à maintenant aux sollicitations du Gouvernement.
Sous la responsabilité du ministère de la Transition écologique et de Mme Barbara Pompili, à qui vous avez confié l’élaboration de ce projet de loi, nous avons ainsi participé à un premier travail de concertation avec les acteurs économiques, les ONG, les organisations syndicales et patronales et les élus, autour de 8 thématiques : la rénovation écologique, l’automobile, le transport de marchandises, le trafic aérien, la gestion des plastiques, emballages et déchets, la publicité, l’artificialisation et les modèles d’aménagement, l’agriculture et l’alimentation. Très bientôt, d’autres réunions seront organisées, cette fois-­ci avec les parlementaires, pour nourrir la construction du projet de loi. Cet exercice est l’occasion pour nous de présenter nos propositions, d’en expliquer les objectifs et la portée à nos interlocuteurs, afin d’enrichir les études d’impact qui doivent être menées dans les différents secteurs concernés.En parallèle de ce suivi officiel, nous avons entrepris, à la mesure de nos moyens, un travail de présentation des 149 mesures de la Convention à destination des acteurs de la vie publique et des citoyens eux-­mêmes. Représentants syndicaux, patronaux, d’associations ou d’ONG, dirigeants d’entreprises, élus nationaux et locaux, responsables d’administration, militants politiques ou associatifs, citoyens, engagés ou non, tous doivent être en mesure de s’approprier nos travaux ; ce sont plusieurs dizaines de rencontres, réunions, partout en France,que nous avons organisées ou auxquelles nous avons participé depuis début juillet et qui alimentent la pédagogie collective sur ces questions.
Au cours des prochains mois, nous continuerons à nous rendre disponibles pour expliquer la philosophie générale de notre rapport, raconter l’aventure humaine vécue par les conventionnels, et débattre sur nos propositions à tous les niveaux de la société, dans le respect des valeurs de justice sociale qui nous animent. Il s’agit là d’un engagement moral vis-­à-­vis de nos concitoyens que nous espérons voir se saisir du débat, un engagement que nous suivons scrupuleusement depuis que nous avons accepté de rejoindre la Convention il y a maintenant un an.
A l’image de ces nombreuses actions bénévoles, c’est bien la notion d’engagement que nous souhaitons ici rappeler. Mis à part les difficultés techniques ou d’ordre logistique que nous avons évoquées directement avec certains de vos ministres -­valorisation professionnelle de l’expérience de la Convention, création d’un statut spécifique du “citoyen” pour combiner vie personnelle et engagement fort, meilleure visibilité sur le calendrier de travail et les modalités de participation aux différentes réunions, etc. -­, nous avons le sentiment de manquer d’un soutien clair et défini de la part de l’exécutif dont les prises de position nous apparaissent parfois contradictoires. En effet, dans une période où des communications ouvertement hostiles à nos propositions sont formulées par certains acteurs professionnels, des déclarations ministérielles discordantes sur les sujets de l’aérien, de la publicité, du déploiement de la 5G, de la baisse de la TVA relative au transport ferroviaire, ou d’autres, viennent renforcer le trouble et obscurcir la parole présidentielle.
Cet état de fait est source de beaucoup d’interrogations et de remise en question chez les citoyens alors que nous devrions plutôt privilégier une action commune et concertée afin de maximiser les chances pour la France de prendre le virage d’un futur décarboné. L’essence même de la Convention est de privilégier le débat, il s’agit même du moteur de son fonctionnement démocratique ; c’est pourquoi nous sommes à l’écoute des contraintes et conscients des défis que soulève la mise en œuvre de nos préconisations, mais nous ne pouvons continuer à défendre chacune d’entre elles quand nous peinons à trouver dans les actions du Gouvernement l’ambition générale d’une transition écologique efficace. Les interprétations actuellement faites de certaines mesures ont pour seul effet de nous éloigner de la mission que nous avez confiée : réduire d’au moins 40% les émissions de gaz à effet de serre de la France d’ici 2030.
Alors que le Parlement européen vote le rehaussement des objectifs de neutralité carbone à horizon 2050, est-il seulement envisageable de sacrifier des dispositions nécessaires au changement que nous devons engager?
Par le présent courrier, nous souhaitons ainsi vous affirmer notre détermination et notre volonté de porter nos travaux jusque dans les plus petites communes de France dont certains d’entre nous sont élus, jusque dans la législation nationale via notamment le projet de loi en discussion, ou plus tard, lors du référendum sur la Constitution, voire même jusque dans les institutions européennes que nous avons d’ores et déjà interpellées. A cette échelle, comme sur le plan international, nous avons d’ailleurs plus que jamais besoin de votre soutien et de travailler en coordination avec le Gouvernement afin de garantir l’écoute et la réception active de notre rapport. Dans ce but, nous vous demandons donc de réaffirmer votre engagement formel et public en faveur de l’examen sans filtre de nos propositions, un engagement crucial pour mener à bien ce nouveau mandat de suivi.
Cette requête est formulée aujourd’hui par l’ensemble des citoyens actifs au sein de l’association “Les 150” et vaut pour la posture officielle que nous revendiquons, en dehors de futures actions ou initiatives individuelles de contestation qui pourraient voir le jour d’ici là.
Veuillez agréer, Monsieur le Président de la République française, l’expression de notre très haute considération,
Les 150’citoyens de la Convention Citoyenne pour le Climat.

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