Écobuage : quand Jean Lassalle défend les incendiaires
Pour connaître le rôle du pote de Bayrou, il va falloir attendre la fin de l’article. En attendant, place aux chasseurs de prime – de la PAC – qui brûlent les montagnes du Pays basque par centaines d’hectares sous les applaudissements des autorités publiques françaises.
Fin février 2021. Des centaines d’hectares – 700, 800 ? – crament en plein hiver pendant deux jours. Où ? Au Pays basque, sur les crêtes entre Ascain et Biriatou. La gendarmerie enquête, convaincue que la cata a été causée par un écobuage non déclaré. L’écobuage ? Sur le papier, c’est une méthode ancestrale qui consiste à brûler une terre pour mieux la défricher ou la « nettoyer ». Voire, chez certains bergers, afin d’obtenir une repousse d’herbe plus importante le printemps suivant.
Donc, enquête, et coup de gueule bien informé du maire d’Ascain, Jean-Louis Fournier, qui envisage de porter plainte : « Faire de l’écobuage avec un temps comme ça, c’est de la folie, c’est criminel ! ». Et d’ajouter : « La commune est très touchée. Heureusement il n’y a pas de victime. Par contre, il y a énormément de dégâts au niveau des flancs de la Rhune. Toute la végétation a cramé. Des habitations ont été touchées, il y a eu un démarrage de feu avec une maison-bergerie, une maison dont la charpente est en train de se consumer. La situation demeure préoccupante ».
Pourtant, rien ne se passera, car aussi dingue que cela paraisse, il y a un lobby de l’écobuage. Une semaine après les incendies, le préfet Éric Spitz siffle la fin des interrogations. Le monsieur serait presque rigolo, car pour lui, les incendies ne seraient aucunement liés aux écobuages. Pourquoi ? Mais c’est très simple : il les avait interdits ! Sauf autorisation expresse, qu’il n’avait, en l’occurrence ici, pas accordé. Il ne pourrait s’agir, dans ces conditions, que d’un incendie criminel, et même pas français, puisque le feu venait d’Espagne. Fin de l’histoire ? Début.
Spitz, qui ne connaît évidemment rien au problème, ose en effet : « L’écobuage est nécessaire, c’est une pratique ancestrale qui permet d’entretenir nos paysages et il est de mieux en mieux encadré. » Des mots qui font hurler Jenofa Cuisset, présidente de l’association Su Aski – « Halte aux feux », qui bagarre justement contre cette méthode : « Ce que faisaient les anciens n’a strictement rien à voir avec ça. On brûlait des petites surfaces, pas forcément de manière annuelle, cela pouvait être tous les 2, 3, voire 4 ans. On était sur place avec des pelles, de l’eau (…) On ne brûlait pas la montagne entière, comme cela se fait à l’heure actuelle. »
Genofa précise à Charlie : « On voit désormais des gens qui vous disent que s’ils ne brûlent plus, il n’y aura plus de pastoralisme. Mais c’est une blague ! Quand je suis arrivée en 1973, il y avait partout en montagne des brebis et des bovins. C’est terminé. Les troupeaux restent désormais près des fermes et la montagne est vide. Je reviens d’un pèlerinage et je suis rentrée en larmes. Partout là-haut, j’ai vu des arbres calcinés, dont un qui faisait bien 20 mètres de hauteur. L’érosion est épouvantable, la terre est mise à nu et laisse glisser des schistes ardoisiers. Pourquoi ? Mais parce que les incendiaires reçoivent des subventions de l’Europe – la fameuse PAC – pour « nettoyer » la montagne. »
Fantasmes ? Ce serait plus reposant pour l’esprit, mais ce n’est pas le cas. Bien que les chiffres précis manquent, la montagne brûle bel et bien, et ce n’est pas près de s’arranger. Un certain Jean Lassalle prend en effet fait et cause pour les incendiaires. Rappelons-le, Lassalle, grand pote de Bayrou, s’est fait une spécialité des trémolos anti-parisiens, prétendant défendre ses si belles vallées pyrénéennes tantôt contre l’ours, tantôt contre l’étranger venu des villes. Eh bien, il est pour les écobuages. Président de l’association départementale des élus de montagne, il affirme que sans eux, « ça en serait fini du pastoralisme, mais aussi d’une certaine idée d’un tourisme qui va être de plus en plus amené à se développer à travers nos montagnes. Il faut qu’elles restent verdoyantes, au lieu d’être des ronces, des futaies ou même des forêts ».
Le propos guilleret de Lassalle est donc de faire disparaître les forêts pour mieux attirer le vacancier. Fortes paroles et grand personnage. Commentaire inspiré de Sandro Rato : « En plus d’avoir déjà perdu une immense partie de la forêt originelle, aujourd’hui les montagnes basques deviennent des monts chauves. Des guirlandes de feux se superposent la nuit à perte de vue, pour des lendemains fumants qui déchantent. La croûte terrestre continue de brûler en silence sous les troncs nus anthracite et les végétations devenues brunes, et les particules de pollution émanant des feux sont élevées jusqu’à Bordeaux ». Jean Lassalle, ce héros.
Fabrice Nicolino ·
Les feux sont interdits par Arrêté préfectoral de la Drôme
Interdiction brûlage des végétaux
Suite à l’épisode neigeux survenu les 14 et 15 novembre 2019, et au regard de son caractère exceptionnel, le préfet de la Drôme avait temporairement autorisé le brûlage des déchets verts selon l’arrêté n°2013-114- 0007.Désormais, plusieurs mois après cet épisode neigeux, cette dérogation n’a plus lieu d’être.
Depuis le 25 mars 2020, tout brûlage de déchets verts et végétaux, tout écobuage est à nouveau interdit selon l’arrêté n°26-2020-03-25-004, dans tout le département de la Drôme, et cela pour des raisons de santé publique et de lutte contre la pollution de l’air.
Dans ce contexte particulier d’épidémie liée au virus Covid-19, dont les symptômes sont respiratoires, et même en période de confinement, le préfet fait appel au bon sens et à la responsabilité de tous pour ne pas créer de gêne supplémentaire de la population, du fait de cette activité de brûlage fortement émettrice de particules fines dans l’air et d’odeurs irritantes. En outre, à une période où les risques d’incendie de forêts et de broussailles recommencent à émerger (début de sécheresse), l’activité de brûlage fait peser des risques supplémentaires de départs de feux. Elle peut donc générer la mobilisation des services de secours ou des forces de l’ordre, à un moment où toutes les forces de sécurité sont mobilisées pour veiller au respect du confinement et au maintien de la sécurité.
Aussi, en cette période de confinement, il est demandé de déposer au fond de son jardin les résidus de taille ou de tonte de pelouse, dans l’attente de pouvoir se déplacer de nouveau dans le réseau des déchetteries locales.
Il est rappelé que :
• des alternatives au brûlage existent, notamment par broyage, par enfouissement, et par utilisation
des déchets verts comme paillis ou comme engrais vert. C’est un geste environnemental très
bénéfique pour la qualité des sols et bon pour la planète en terme de bilan carbone.
• le brûlage de déchets verts est interdit par l’article 84 du règlement sanitaire départemental depuis de nombreuses années, et constitue une infraction pouvant faire l’objet d’une contravention de 3ème classe de 450 euros (pouvoir de police du Maire) ;
• le brûlage de 50 kg de déchets verts (équivalent de 5 à 6 sacs de 50 litres de tonte de pelouse) pollue autant que rouler environ 13 000 km avec un véhicule essence ou diesel récent (Source ATMO AuRA – 2016).
http://www.drome.gouv.fr/interdiction-brulage-des-vegetaux-a7371.html
Documents associés :
- > Arrêté interdiction emploi du feux en Drôme – 73.9 ko – 26/03/2020
- > CP – interdiction brûlage des vegetaux dés le 25/03/2020 – 88.5 ko – 26/03/2020